Rencontre avec Sarah Tlili

Il y a des rencontres qui ne s’expliquent pas, des moments où on ressent l’envie d’aller vers l’autre, partager des émotions, prendre conscience de la chance accordée de jouir d’une pleine liberté… La rencontre avec Sarah, son engagement, son témoignage sur sa vie et sa condition de femme photographe en Algérie résonnent d’autant plus fort aujourd’hui. Merci à elle de s’être livrée et de nous avoir transporté l’espace de quelques photos…

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Qui je suis : une jeune algérienne, la photo est une continuité de ma personne, j’aime l’aventure et surtout la liberté. Je suis une femme vivant dans une société dans laquelle je brave les interdits avec pour seule arme, mon appareil photo. En Algérie, les contraintes sont nombreuses et les interdits multiples, les gens ont tout simplement peur, peur de l’objectif et peur de la femme.

Mon rêve ? Voir le monde avec seul un sac sur le dos et mon objectif pour me guider. Je veux m’enrichir de diverses cultures. Mais pour commencer : l’Algérie, ce vaste Pays (plus de 2 millions de km2) avec des paysages à vous couper le souffle. Savoir d’où l’on vient pour mieux comprendre où on va… n’est ce pas ?

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Point de départ : Tizi-Ouzou, en Kabylie. 2500 km me séparent de mon point d’arrivée : Djanet.
Durant mon voyage, je vois les paysages qui se dessinent et se transforment… J’en ai le souffle coupé et je n’ose pas sortir mon appareil photo de peur de ne pas pouvoir rendre justice à ce moment magique que seules les personnes ayant visité le Sahara peuvent comprendre. Pour cette fois, je décide de ne pas interrompre ce moment et de ne pas dégainer mon appareil.
J’ai escaladé le Mont Timber à 1700m d’altitude, je commence à prendre mes photos et au travers de mon objectif je perçois le dégradé de lumières, le sable, la verdure, la roche et les hommes. Mes photos capturent le silence du désert.

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Après une longue journée de route, Un touareg prend son thé s’éloigne discrètement et va sur le sommet d’une dune pour ce reposer : l’homme bleu au repos.

A Tassili-N’aajjer sur mon chemin, j’ai visité Ksar d’Azerouaz, un hameau de village laissé à l’abandon par la population. On y retrouve des modèles d’habitation traditionnels (argile, terre, pierre, herbe) et sont souvent assimilés à des signes de pauvreté. Dans le temps, le Ksar se construisait généralement sur un grand axe commercial et à proximité d’une oasis, me voici en admiration de ses portes et ses fenêtres.

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Perché sur une antenne mobile de 25m de hauteur, je surprends un homme en plein milieu du désert qui tente de ne pas faillir à son obligation religieuse… l’heure de la prière lui chuchote ce soleil si frappant. Nous avons roulé dans la nuit, sans aucune source de lumières sauf ce beau clair de lune à suivre des virages qui n’existent que dans les têtes des Touaregs.

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Durant ce voyage, j’ai aimé des inconnus à travers mon objectif, j’ai pleuré devant cette belle montage qu’on appelle Tadrart à ne plus pouvoir m’arrêter et j’ai retrouvé cette connexion avec le monde Berbère à travers ses paysages.


Faisons un petit rewind, comment en suis-je arrivé à ce grand voyage à travers le désert algérien pour assouvir une passion, celle de la photographie.

J’ai commencé modestement dans le salon de mes parents, avec 6 bottes de foin et ma sœur comme mannequin à ses heures perdues. Ma sœur m’a énormément inspiré à cette période-là. Nous avons commencé à faire quelques shootings avec des amies à la maison, sur les toits et même dans un garage mécanique.

Une séance photo dont le sujet était l’amour, voilà bien un autre sujet tabou. En plus peut-être de la présence de la religion restrictive, nous sommes un peuple très pudique.
Celle de la femme enceinte. Pourquoi je lui cache le visage ? Dés qu’une femme devient mère, elle n’existe plus tant elle y consacre son existence, je voulais ici l’illustrer et non le défendre.

La femme Kabyle : Quoi de mieux pour représenter la femme kabyle que ses bijoux et sa robe. Les trois couleurs constantes des bijoux kabyles sont le bleu pour l’océan, le vert pour la verdure et le jaune pour le soleil.

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La photo du prêtre : 
C’est une photo volée, prise à Notre Dame d’Afrique sur les hauteurs d’Alger.

Je suis une femme photographe et vous pouvez remarquer que la femme est très présente dans mes photographies, je veux juste rendre justice, la mettre en avant et surtout la libérer à travers cet art même.

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