Souvenirs de skate
Je me souviens que la première fois que j’ai pris le RER de ma vie, c’était pour aller en direction de Ivry-sur-Seine, dans le seul but de m’offrir une nouvelle planche de skate.
C’était au milieu des années 80 et pour accéder au graal, il fallait accepter de se déplacer loin des bases parisiennes, et découvrir la banlieue. Je me rappelle aussi que l’un de nos skaters favoris, Mike Vallely venait tout juste de sortir son nouveau pro model chez World Industrie, une magnifique planche, totalement atypique pour la période, puisqu’extrêmement étroite et possédant un double tail (soit 2 extrémités relevées), curiosité qui allait donner la tendance pour les décennies à venir.

Pierre-André Senizergues

Christian Hosoi (Ollie Air) et natas Kaupas (T-shirt jaune) – Venice Beach 1989 – Photo : Inkulte©
Pour ceux qui se souviennent, le petit monde du skate se divisait en 3 grandes spécialités et il fallait donc dans un premier temps choisir son camp et surtout son matériel.
Freestyle, rampe et street
Le freestyle et les formes de planche étroites et si peu maniables pour le reste des skaters, était dominé par 2 grandes figures charismatiques :

Rodney Mullen

Natas Kaupas
– l’américain Rodney Mullen, inventeur de très nombreux tricks (kickflip ou 360 flip) et qui laissera à jamais une trace indélébile sur ce sport,
– le français Pierre-André Senizergues, qui a eu le culot d’aller défier les USA sur leur terrain de jeu, décrochant même le titre de champion du monde en 1985. Quelques années plus tard, il défiera encore les américains sur leur terrain de jeu en lançant une des marques les plus connues de chaussures, Ethnies pour ne pas la citer

Tommy Guerrero
Au niveau du street, j’ai souvenir que pour éviter de se faire éjecter de la planche au premier gravier rencontré sur le bitume, il était plus que conseillé de s’équiper de roues assez molles (88A !!!) et les génies de la période étaient nombreux ! Personnellement, dans mon groupe d’amis, on suivait attentivement les facéties urbaines de Tommy Guerrero (Powell & Peralta), le très aérien Natas Kaupas (Santa Monica Airlines), et l’incroyable fou furieux Mark Gonzales (Vision Skateboards), le tout premier skater a défier les rampes d’escalier !!!
Concernant la rampe, un duel permanent se jouait entre 2 skaters diamétralement opposés dans le look et le style :
– l’intouchable premier de la classe et gendre idéal Tony Hawk, toujours au top actuellement et dont il faudra désormais suivre les traces de son fils Riley,
– le playboy et bad boy américain, Christian Hosoi, beaucoup plus rock’n roll et voltigeur de légendes avec ses incroyables « Christ air ».
Malgré tout, en France, le mouvement était en mouvement et de premières compétitions voyaient le jour. On était encore loin du Contest de Münster organisé en Allemagne, soutenu depuis le début par l’historique magasin de planche de skate TITUS, qui vendait du rêve à tous les kids de l’hexagone, tant le nombre de stars d’outre-atlantique faisait le déplacement.
Je me souviens aussi encore que pour être informé de tout ce petit monde, il fallait être terriblement patient et guetter le facteur qui déposait une fois par mois les précieux magazines made in USA auxquels nous étions abonnés. Transworld ou Thrasher ont été des mines d’informations inépuisables pour apprendre de nouvelles figures et aussi se cultiver.
Rappelons que le skate, à la fin des années 80 n’était pas encore un sport reconnu et encore moins un business lucratif sponsorisé par des firmes internationales !
Graphiste, directeur artistique ou designer
Il m’arrive encore de prendre le temps de feuilleter les numéros de cette époque, et j’ai récemment pris conscience que ces revues si chères ($$$) ont contribué a notre avenir et aux métiers que nous occupons tous aujourd’hui ! Je continue à rouler en famille avec mon infatigable planche de skate, une très belle Jason Jessee de chez BLIND, qui a sans aucun doute quelques centaines de kilomètres au compteur !!!

Jason Jessee
D’un point de vue du graphisme, le skate, dans le design des planches, des vêtements ou même des publicité, a donné une véritable implulsion à notre créativité de petits français. Pour s’en rendre compte, je vous laisse le sin de regarder les films qui relatent le travail d’un des plus célèbres artistes de la période : JIM PHILLIPS.
Pour les plus jeunes, il faut imaginer que l’internet n’exister pas encore et que la TV ne s’intéressait pas encore à ce mouvement jugé sans doute, trop underground.
Côté musique, c’est par les vidéos telle que « SPEED FREAKS » ou « WHEELS OF FIRE » (VHS) achetées à prix d’or et visibles pour la plupart en noir et blanc (norme VHS vs NTSC vs PAL), que nous avons forgé notre contre-culture et pu explorer de nouveaux genres.
De Black Flag, Bad Religion, Dinosaur Jr, Descendents, The Screaming Trees ou The Weirdos, une véritable discographie punk rock marquante pour le restant de nos jours.
On pourrait parler et écrire des milliers de lignes sur cette période si magique et toujours présente… Keep skating et souvenez-vous :
Skateboarding is Not a Crime
Quelques liens à suivre :
http://www.thrashermagazine.com/
http://skateboarding.transworld.net/
http://www.titus-shop.com